On se souvient de l’élan mondial de solidarité lors de l’enlèvement des 400 étudiantes par Boko Haram, en 2014. Le #BringBackOurGirls est le témoin des efforts de chacun pour obtenir leur libération.
Malheureusement, la même année, les 300 écoliers de Zana Mobarti n’avaient pas suscité le même émoi. Le 24 novembre 2014, les troupes de Boko Haram arrivent à Damasak, bloquent les routes et piègent les villageois. Ils entrent dans l’école primaire, ferment les portes et y séquestrent les 300 enfants âgés de 7 à 17 ans.
Une mère raconte :
« C’était tôt le matin quand j’ai entendu les tirs et le chaos. Mon mari était déjà parti de la maison pour aller au marché. Alors j’ai saisi mes enfants, mon fils de 4 ans et ma fille de 2 ans. Et j’ai couru. Mais nous nous sommes heurtés à Boko Haram, ils nous ont retenus au centre de la ville. Ils ont apporté de plus en plus de femmes et d’enfants. Puis ils nous ont tous amenés à l’école de Zana Mobarti... Je n’ai plus vu mes enfants depuis ce jour. »
Boko Haram utilise dès lors cette école comme base militaire. Les massacres suivent. Des témoins parlent de centaines de cadavres.
« Ils [Boko Haram] sont arrivés à l’école primaire Zana Mobarti, l’ont attaqué et en ont fermé toutes les portes. Il y avait au moins 300 enfants captifs avant que certains réussissent à s’échapper. Ils refusaient que l’on enseigne les enfants en anglais. Ils les ont enfermés et leur ont enseigné le Coran. Je suis resté captif de Boko Haram au moins 6 jours à Damasak. J’ai pu m’échapper en tombant dans la rivière. De nombreuses personnes étaient jetées à la rivière. Certains arrivaient à nager pour s’échapper. Certains n’arrivaient pas à s’accrocher aux herbes. On tirait sur certains. En dessous du pont, on a trouvé beaucoup de cadavres et de squelettes. Beaucoup de personnes ont été abattues et jetées à la rivière. Aujourd’hui encore, nous ne savons pas où sont nos enfants. »
Des vidéos et des images satellites obtenues et analysées par Human Rights Watching confirment ce témoignage : 70 cadavres sous le pont, plus de 400 corps dans la ville. Les 300 enfants ont été déplacés. Aucun n’est revenu. Ils seraient, d’après des témoins, aux mains de Boko Haram, à la frontière du Tchad. Au Nigéria, en 6 années de conflits, Boko Haram a tué des centaines de civils, enlevé femmes et enfants, détruit des villes, des villages et plus de 900 écoles.
M.C.
Crédit photo : Reuters